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Drôle d’impressions. Une incursion dans l’atelier de gravure Grafikas


Presse Minerve à platine, dite « pédalette », première moitié du XXe siècle. Toujours en fonction
Presse Minerve à platine, dite « pédalette », première moitié du XXe siècle. Toujours en fonction

Une salle lumineuse du Labo Novo, maison d’art et d’essai à Reillanne, occupée par des machines anciennes et du matériel d’imprimerie, accueille depuis le printemps 2019 des graveuses et des graveurs de divers horizons. Au sein de cette unité d’expérimentation de la gravure et de la forme imprimée, des artistes permanents ou invités se retrouvent pour fabriquer des images et transmettre leurs savoir-faire lors d’ateliers tous publics. Bienvenue dans un espace convivial d’explorations typo/graphiques.


Entrer dans l’atelier Grafikas, c’est découvrir un de ces lieux où les rencontres fertiles et l’ébullition créatrice sont palpables dans l'air. Arnaud, artiste-verrier marseillais en résidence sauvage, fume une cigarette devant la porte, à côté du chat endormi au soleil. Penchée sur la composition typographique d’un calendrier, Maria, lacuratrice du Labo Novo, paraît très absorbée. David nettoie ses mains tachées d’encre avec un chiffon. Celui qui se décrit comme « graveur-estampeur » ressemble à cet instant à un garagiste couvert de cambouis. Sur les murs, suspendues à des fils à linge, une profusion d'affiches et de cartes imprimées, où se mêlent textes poétiques, dessins figuratifs, messages engagés et images oniriques.


Vive la gravure populaire !


Les adeptes* qui gravitent autour de l’atelier pratiquent principalement la gravure sur bois et la taille d’épargne, en relief. Un type de gravure populaire, par opposition avec la taille-douce, plus précieuse et savante. « La gravure sur bois est la gravure de l’imprimerie, elle a un grand potentiel de reproduction », explique David, « tu encres ton image au rouleau et tu imprimes, c’est ludique, simple et rapide. » Il y a chez lui cette envie de partager avec tous, et à moindre coût, un art fondé sur des techniques ancestrales. L’atelier est ouvert aux adultes le mercredi, et des stages pour enfants sont proposés – sur place ou en itinérance – lors de festivals, et en milieu scolaire.


Une esthétique de l’imprimé


Les sources d’inspiration des graveurs de Grafikas sont multiples et tirées de l’histoire de cette technique. David raconte que la gravure sur bois est traditionnellement associée au livre. Une maison d’édition comme Ferenczi (fondée en 1879 à Paris) proposait des romans populaires illustrés par des gravures. La gravure se marie souvent au texte, en particulier à la poésie, comme dans le loubok russe et dans la littérature de cordel brésilienne, mode d’auto-édition à grand tirage de poèmes et de saynètes illustrées. Mais l’exemple le plus célèbre reste celui du jeu de tarot médiéval.


Des projets fantastiques


S’appropriant l'imaginaire fantastique de la gravure, le collectif Gravos – David Audibert, David Sedano, Renaud Eymony – prépare un film d’animation inspiré d’un conte de Julio Cortázar, « Fin du monde de la fin » (tiré du recueil Cronopes et Fameux, 1962). L’histoire : dans un monde où chacun est devenu scribe et produit une montagne d’information, la multiplication des livres imprimés devient incontrôlable, les bibliothèques débordent, et la pâte à papier finit par remplir les océans. Une critique de la prolifération de mots que génère la société numérique aujourd’hui, mais peut-être aussi un clin d’œil au désir frénétique de ces jeunes xylographes de diffuser encore et toujours leurs images sur du papier imprimé.


*Font également partie de la galaxie Grafikas : Julie Monta (relieuse), Pénélope La Méta, Samuel Autexier et Dany Tavori.


Infos pratiques : Atelier Grafikas ouvert au public le mercredi de 18 h à 20 h, et à la carte en fonction des projets. Ateliers scolaires (écoles, collèges, lycées) sur demande. 23 place de l’Ormeau à Reillanne. Facebook du Labo Novolabonovo@gmail.com loeildulargue@riseup.net

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